
Implanté au cœur de la Métropole de Kartapovsk, le Nexus de la Haute Concorde est un vaste complexe brutaliste de 350 000 mètres carrés, conçu pour accueillir les ambassades, légations, délégations et missions permanentes des puissances galactiques en relation avec l'Unité Plurielle du Phukotov.
Monolithes de béton, d’acier, de messes basses, d'accords stratégiques et de décisions inapplicables, le Nexus incarne l’ambition d’un ordre galactique stable — ou, à défaut, théâtralement ritualisé. L'architecture brutaliste, à la fois intimidante et opaque, typique de l'architecture phukotovite post-guerre civile, reflète deux vertus majeures de la diplomatie phukotovite : l'intimidation architecturale et la confusion fonctionnelle.
Ce bâtiment repose en partie sur le postulat que son apparence dissuadera les nations les moins sérieuses de s'y installer, et permettra de filtrer les partenaires et les correspondants sérieux des rigolos à l'entrée, et que le système interne opaque et l'immensité du bâtiment permettront aux autorités de l'UPP de rester maîtres en son sein.
À l'intérieur de cet édifice, nous retrouvons plusieurs lieux notables :
- Atrium des Concordats :
Cœur architectural et symbolique du Nexus, l’Atrium des Concordats est un volume vertigineux de béton poli et de vitres fumées, éclairé par une lumière zénithale filtrée à travers un plafond aux motifs protocélestes.
C’est ici que sont organisées les signatures de traités, les cérémonies d’entrée en fonction des ambassadeurs, et les expositions temporaires de bonne volonté.
L’acoustique volontairement confuse de l’endroit vise à empêcher toute conversation confidentielle et informelle, ce qui en fait un lieu sûr pour les discours officiels — mais peu pratique pour les vérités. - Déambulatoire de la Comédie :
Cette galerie monumentale serpente autour des principaux blocs du Nexus. Bordée de fresques allégoriques représentant des scènes diplomatiques réelles, mais très souvent mal interprétées, elle relie tous les espaces sans jamais offrir de ligne droite.
La Comédie sous-entendue, dont son nom est tiré, y est à la fois celle du ballet diplomatique incessant entre diplomates hypocrites et celle des malentendus ritualisés par l'administration de l'UPP. Les phukotovites considérant que les représentants y pratiquent l’art du détour formel, aussi bien architectural que rhétorique, le cynisme et l'ironie culturelle l'ont emportées pour pousser la farce jusqu'au nom. - Salle Pourpre :
Cette salle qui aurait pu être appelée la "Chambre des discordes temporairement suspendues" est une salle polygonale insonorisée, mais constamment écoutée et dotée de murs en béton pourpre teinté et d’un système de neutralisation olfactive.
Des sièges individuels, isolés par des cloisons semi-translucides, permettent aux délégués de s’ignorer tout en se toisant.
Un pupitre central, rarement utilisé, rappelle qu’un accord reste possible et peut-être utilisé lorsque les représentants souhaitent négocier. En théorie. Cette salle est un lieu hautement technologique au service des situations de tension de l'UPP vis-à-vis d'une autre entité, mais aussi un lieu de médiation internationale neutre et sécurisé. - Salle Ocre :
Saturée d'une lumière chaude, tapissée de matériaux moelleux et de symboles de fraternité galactique parfois un peu niais, la Salle Ocre est conçue pour accueillir les négociations entre entités amicales.
Chaque table est circulaire, chaque chaise légèrement inclinée vers l’autre, le tout pensé pour le rapprochement. Des boissons de courtoisie y sont servies — parfois identifiables.
L’atmosphère y est si aimable qu’elle en devient suspecte. Euh... que fait votre main sur ma cuisse cher Valarian ? - Salle Beige :
Ici, tout est... modéré. Le mobilier modérément confortable, la pièce modérément lumineuse, l'atmosphère modérément motivante. La Salle Beige est l’antichambre des paroles vagues, des intentions ni trop ambitieuses, ni minimes. C'est une salle somme tout basique, banale.
Les discussions y sont prudentes, les formulations passives, et les postures soigneusement ambiguës.
Aucune décision ferme n’en est jamais sortie, mais aucune guerre non plus. La diplomatie s'y fait petit à petit. - Cour de la Pensée :
Patio intérieur au centre du complexe, la Cour de la Pensée est un lieu de retrait, de repos, de méditation ou de repli stratégique.
Des blocs de pierre brute, disposés sans logique apparente, servent de bancs ou de pupitres selon l’angle de vue.
Les végétaux qui y poussent sont tous des espèces diplomatiquement acceptées par la majorité intergalactique.
Ici les diplomates ont tout loisir de méditer sur l’absurdité des alliances passées et futures et de se remémorer l'hypocrisie dont ils ont été auteurs ou destinataires.
Il est interdit d’y parler à voix haute. Les décisions les plus profondes y sont parfois prises… ou oubliées au fil d'une sieste. - Bloc des Interprétations :
Centre linguistique, herméneutique et psychanalytico-symbolique, le Bloc des Interprétations héberge traducteurs, contextualisateurs, décodeurs culturels, et simulateurs d’émotions aliennes.
Construit comme un labyrinthe acoustique, il empêche toute compréhension directe entre les étages, et impose sa médiation constante pour garder le contrôle sur ce qui est dit, y compris pour les communications internes.
On y croise plus de badges que de visages, et chaque couloir contient au moins deux panneaux contradictoires.
Ce bloc est si complexe qu'il demande parmi les plus hautes qualifications de la planète et dispose de sa propre section psychiatrique pour son personnel.
Le Nexus de la Haute Concorde n’est donc pas seulement un lieu de négociations : c’est un théâtre sacralisé de l’ambivalence galactique où l'ironie et le cynisme pukotovite y sont poussés parfois une fois de plus jusqu'à l'absurde. On y simule la paix, on y joue la guerre, on y rédige des protocoles pour retarder les décisions et les crises. L'Unité Plurielle y affirme son centralisme par la confusion ordonnée, et son ouverture par des procédures de validation longues de 47 formulaires pour les peuples lambda. La vitesse reste plus importante pour les peuples frères ou stratégiques. La raison d'être de la bureaucratie diplomatique est réellement d'être un filtre à intérêt entre planètes motivées à nouer contact, et les autres.
Entrer au Nexus, c’est s’engager dans un ballet où chaque pas est codifié, chaque silence interprété, et chaque poignée de main... facultative. L'absurde est ici assumé contrairement aux autres systèmes diplomatiques hypocrites. La rumeur dit que l'UPP songe à vendre des places pour admirer le spectacle diplomatique galactique. Mais cela n'est qu'une rumeur.
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